Elie M.
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"Revisiter l'Apocalypse", nécessité pour aujourd'hui

Il ne s'agit pas d'un Nième commentaire spirituel, mais de la redécouverte fondamentale d'un texte dont le sens réel, et d'abord le plan, semblaient hors d'atteinte.
De ce point de vue, le livre de Françoise Breynaert L’apocalypse revisitée, une composition orale en filet (Parole et Silence, 2022, 377 p., 26€) constitue une avancée majeures, à la suite des travaux de ses prédécesseurs de l’école de Marcel Jousse, en particulier Pierre Perrier et le P. Frédéric Guigain. Pour rappel, un « filet » est une manière de réciter un ensemble de « perles » essentiellement de deux manières différentes, l’une qu’on peut dire horizontale et l’autre verticale, selon un système de boulier-compteur tel qu’il en est représenté un sur la couverte. Le but de ces deux manières de réciter est de favoriser la méditation de la « Révélation » (apocalypse en grec), reliant diversement les perles les unes aux autres mais pas n’importe comment : l’ordre de celles-ci n’est pas étranger du tout à leur signification.

Voici le début de l’introduction :
« L’Apocalypse se présente comme une « révélation » concernant « ce qui doit arriver bientôt » (Ap 1, 1), et elle s’achève par l’attestation « Oui, mon retour est proche ! » et la prière « Amen, viens, Seigneur Jésus ! » (Ap 22, 20 BJ). Clairement, il s’agit d’un message capital : un message sur le retour glorieux du Christ.
Or, certains, au nom d’une certaine rationalité, nient l’idée d’une révélation de ce qui doit advenir. Comment pourraient-ils dès lors analyser le texte de l’Apocalypse ?
D’autres, et ils sont très nombreux en Occident, pensent que le mot « apocalypse » est synonyme de destruction et de fin du monde. Cependant ce mot signifie simplement « révélation » et ce qui est révélé, c’est le sens d’une histoire qui ne se termine pas par une destruction. Il y a donc un apriori à écarter, et nous le ferons dès cette introduction. Nous pourrons alors « revisiter » l’Apocalypse.
Et ce n’est pas tout. La structure d’un texte détermine, pour une part importante, le sens à lui donner. L’Apocalypse de saint Jean apparaît dès l’abord marqué par le chiffre sept : sept Églises à chacune desquelles une lettre est destinée, puis il est question de sept sceaux, puis de sept trompettes. Ensuite, après d’autres visions, il est question de sept calices ou fléaux envoyés par des anges. Ensuite, les structures paraissent de moins en moins évidentes, et chaque commentateur a tenté d’esquisser son propre plan. Tous partaient de l’idée d’une composition écrite de l’Apocalypse, et en grec, c’est-à-dire à la manière du monde gréco-latin ; ne serait-ce pas ce qui empêche d’arriver à un début de solution satisfaisante ?
Saint Jean est juif et parle araméen. Si, maintenant, on prend en compte le fait que sa culture est donc orale, même si les garçons de douze ans sont présumés capables de lire la Bible en hébreu (ils la connaissaient un peu par cœur heureusement), alors on peut partir d’autres fondements, en recherchant dans les méthodes de composition propres aux cultures orales en général et à la culture biblico-araméenne en particulier les clefs nécessaires pour « entendre » l’Apocalypse autrement : la « revisiter ». »

A noter en fin de l’ouvrage : une annexe aide à resituer le livre de Jean dans son contexte idéologique : L’Apocalypse, Qumrân et les post-christianismes (p.345-365).

La structure de l’Apocalypse semble défier la compréhension après la série des sept trompettes, du moins si l’on ne voit pas qu’elle a un centre autour duquel tout est agencé :
Ce noyau, 12,1 – 13,10 , montre l’enjeu du combat qui traverse notre histoire. D’une part, « une Femme enveloppée de soleil », son fils le Messie, et ses autres enfants qui persévèrent dans les commandements de Dieu. Et d’autre part, le au diable ou « Dragon », et la bête qu’il inspire, c’est-à-dire une organisation ou une administration qui mène et corrompt l’inspirateur le monde.
Ce noyau éclaire l’enjeu de chaque fil, horizontal ou vertical, ce qu’un plan plus élaboré met davantage en lumière :
Ce noyau définit un tournant de l’histoire à partir duquel il faudra prendre position.
La première perle du fil suivant (Ap 14, 6-7) nous indique que la « Bonne Espérance » contient « le Jugement ». Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que le Jugement n’est pas la Fin du monde, c’est le jugement des impies qui s’opposent à la bonté du dessein créateur de Celui « qui a fait les cieux et la terre, et la mer et les sources d’eaux ! »

Le Christ doit revenir accompagné des anges et des justes « revêtus de byssus blanc » (19, 14), c’est-à-dire les justes ressuscités revêtus de leurs bonnes œuvres. Les habitants du monde seront confondus par la beauté et la gloire qui rayonne du Bien ! Tel un cavalier céleste, le Christ opèrera un jugement, mais l’épée est dans sa bouche et non pas dans sa main, l’Amour n’a pas besoin des forces de coercition. Tandis que ses ennemis disparaîtront (Ap 18-20), le Christ règnera sur la terre avec tous ceux qui auront rejeté « la marque de la bête » ; et, finalement, son règne ouvrira sur l’Éternité où la mort physique aura disparu (Ap 20-21), comme le dit saint Irénée à la fin du 2e siècle, ce royaume « sera le prélude de l’incorruptibilité, royaume par lequel ceux qui en auront été jugés dignes s’accoutumeront peu à peu à saisir Dieu » (AH, V, 32, 1).

Ainsi, l’Église est porteuse d’une espérance formidable pour le monde.
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A ce sujet, voir aussi : Parution : Le Christ viendra en Roi et Juge ! | EEChO,
Symbole des apôtres, Irénée, seconde Venue | EEChO,
Venue glorieuse : difficulté factice et comparaisons éventuelles | EEChO,
Rencontrer le Christ : les deux dimensions plénières | EEChO,
Antichrist et monde après la Venue Glorieuse : discussions | EEChO,
Parution : »La venue glorieuse » pour des jeunes | EEChO,
L'Apocalypse "en filet". Introduction,
Le retour du Christ dans la gloire. Maranatha ! Introduction..